Pourquoi le Canada a besoin de l’Indice canadien du mieux-être

En 1930, dans un essai intitulé Economic possibilities for our grandchildren, l’économiste John Maynard Keynes a prédit que dans un siècle, le produit intérieur brut (PIB) serait de quatre à huit fois plus élevé, et que d’ici 2010, la semaine de travail serait de 15 heures.[1] Le grand défi serait de combler le temps de loisirs des gens avec des activités significatives.

Bien que la première moitié de la prédiction de Keynes se soit avérée, l’amélioration de la qualité de vie correspondante est loin de s’être réalisée. Comme le montre clairement la figure ci-dessous, le PIB par habitant au Canada a augmenté beaucoup plus rapidement que le mieux-être tel qu’il est mesuré par l’Indice canadien du mieux‑être (ICM). Dans la période de 21 ans, de 1994 à 2014, le PIB a augmenté de 38,0 %, alors que l’ICM s’est accru de seulement 9,9 % (voir la Figure 1). Jusqu’à la récession de 2008, le PIB a augmenté de 29,9 %, et l’ICM de 8,8 %. Depuis la récession, le PIB, après avoir fléchi, a augmenté d’un autre 8,1 %, alors que notre mieux-être a cru d’à peine 1,1 %. L’écart entre ces mesures révèle un enjeu plus important : le PIB ne peut pas à lui seul mesurer comment la population s’en tire globalement.[2]

De plus en plus, les citoyens et leur gouvernement réfléchissent « au-delà du PIB » en tant que mesure de nos progrès et de notre qualité de vie. Même si le PIB représente une mesure importante de notre rendement économique, il ne saisit pas ces aspects de nos vies que nous chérissons le plus, comme l’éducation, la santé, l’environnement et les relations que nous avons avec autrui. Par ailleurs, le PIB ne tient pas compte des coûts de la croissance économique, comme la détérioration de l’environnement, la perte de terres agricoles ou l’inégalité croissante des revenus.


[1] Keynes, J.M. (1930/1963). Economic possibilities for our grandchildren. Dans J.M. Keynes, Essays in persuasion (p. 358-374) London : Macmillan.

[2] Une description du PIB et quelques-uns des mythes qui l'entourent se trouvent à l’Annexe A.

tableau

Valeurs et domaines fondamentaux cernés par les Canadiens

Depuis l’instauration de l’ICM en 1999, et au cours de son élaboration, le processus vise à s’assurer que les Canadiens ordinaires entendent leur propre voix et se voient reflétés dans la mesure.

L’ICM a été créé grâce aux efforts conjugués de dirigeants et d’organismes nationaux, de groupes communautaires, d’experts en recherche et d’utilisateurs d’indicateurs, et dans une large mesure, du public canadien. Au cours de trois rondes de consultations publiques, des Canadiens ordinaires des quatre coins du pays ont exprimé honnêtement ce qui importe pour leur mieux-être. Le processus a abouti à la détermination de valeurs canadiennes fondamentales et de huit domaines de la vie qui favorisent et influencent le mieux-être des Canadiens : Dynamisme communautaire, Participation démocratique, Éducation, Environnement, Populations en santé, Loisirs et culture, Niveaux de vie et Emploi du temps (voir la Figure 2). Au lieu de cibler seulement l’économie, ce cadre de travail met l’accent sur ce qui importe le plus aux Canadiens.

Dynamisme communautaire renvoie à des collectivités dynamiques où les relations entre les gens et les organismes privés, publics et non gouvernementaux sont solides, dynamiques et inclusives et favorisent le mieux-être individuel et collectif.

Participation démocratique signifie d’être engagé dans l’avancement de la démocratie par l’entremise d’institutions, d’organismes et d’activités politiques.

Éducation est l’instruction, la scolarisation et la formation professionnelle fournies systématiquement aux jeunes pour les préparer à la vie et, par extension, il s’agit de l’instruction et de la formation fournies de la même façon au cours de l’âge adulte.

Environnement est l’assise sur laquelle les sociétés humaines sont construites et la source de notre mieux-être soutenu. À une échelle plus large, la protection environnementale comprend la prévention du gaspillage et des dommages, tout en revitalisant nos écosystèmes et en travaillant vers la viabilité de toutes nos ressources.

Populations en santé porte sur le mieux-être physique, mental et social de la population. Il examine l’espérance de vie, le mode de vie et les comportements, ainsi que les circonstances qui ont une incidence sur la santé, comme l’accès aux soins de santé.

Loisirs et culture porte sur la façon dont la participation à des activités de loisirs et culturelles, qu’il s’agisse des arts, de la culture ou des activités récréatives, contribue à notre mieux-être en tant que personnes, à nos communautés et à l’ensemble de la société. La multitude d’activités et de possibilités que nous réalisons et apprécions favorisent notre satisfaction à l’égard de la vie et notre qualité de vie globales.

Niveaux de vie examine les revenus moyens et médians des Canadiens, ainsi que la richesse, la répartition de ces revenus et de cette richesse, incluant les taux de pauvreté, les fluctuations et la volatilité des revenus, ainsi que la sécurité économique, notamment la sécurité relative au marché du travail, au logement et à l’alimentation.

Emploi du temps porte sur la façon dont les gens vivent et occupent leur temps. Il examine comment l’utilisation de notre temps a une incidence sur le mieux-être physique et mental, le mieux-être individuel et familial ainsi que le mieux-être actuel et futur.

Indice compose du mieux-etre de l'icmEnsemble, ces huit domaines offrent un portrait plus complet du mieux-être, en incorporant un ensemble exhaustif de facteurs sociaux, de santé, économiques et environnementaux importants qui contribuent à la qualité de vie globale. Des équipes d’experts reconnus nationalement et internationalement ont ensuite déterminé huit indicateurs valides, fiables et pertinents dans chaque domaine qui sont directement liés au mieux-être. En intégrant les 64 indicateurs et les huit domaines, ainsi qu’en révélant leurs interconnexions complexes, l’indice composé ICM fournit un portrait complet de la qualité de vie au Canada.

L’indice composé ICM suit tous les indicateurs et domaines du mieux-être afin de mesurer nos progrès au cours du temps, en mettant en lumière les aspects où nous nous en tirons bien et ceux où nous pouvons faire mieux.

Un cycle continu d’engagement public, de consultations et de raffinement est l’une des caractéristiques déterminantes de l’ICM. Cela assure que l’indice est fondé sur les valeurs canadiennes, ancré dans les expériences de la communauté, façonné par l’expertise technique et adapté aux connaissances émergentes. L’ICM n’est pas une mesure statique. Alors que de nouveaux enjeux émergent et que de nouvelles connaissances, compréhensions et données deviennent disponibles, l’ICM s’adapte pour renforcer sa mesure du mieux-être sans dévier des valeurs sur lesquelles il se fonde. Aussi, la validation et l’amélioration continuelle de l’ICM sont un processus constant.

Dans le présent rapport, nous décrivons les tendances du mieux-être de 1994 à 2014 en fonction des indicateurs les plus valides et à jour du mieux-être dans chacun des domaines.

Retour au début