Une étape-clé pour comprendre comment la gravitation quantique affecte la physique des basses énergies

Thursday, August 8, 2019

Pour la première fois, des chercheurs ont défini les conditions pour que des théories de la gravitation quantique soient compatibles avec l’une des prédictions capitales de la physique quantique et de la relativité : l’effet Unruh.

Une nouvelle étude menée par des chercheurs de l’Université de Waterloo, de l’École internationale supérieure d'études avancées de Trieste (SISSI), en Italie, et de l’Université Complutense de Madrid, en Espagne, fournit un solide cadre théorique pour aborder les modifications aux prédictions de la théorie quantique des champs dues à la microstructure de l’espace-temps.

L’effet Unruh, du nom du physicien canadien qui l’a établi en théorie en 1976, prédit qu’un observateur en mouvement accéléré observera des photons et d’autres particules là où un observateur dans un référentiel inertiel ne verra que du vide.

« En analysant les conditions nécessaires pour que l’effet Unruh se manifeste, nous avons trouvé que, contrairement à une opinion très répandue dans la communauté scientifique, des détecteurs de particules peuvent avoir une réaction thermique sans qu’il y ait thermalité », a déclaré Eduardo Martin-Martinez, professeur adjoint au Département de mathématiques appliquées de l’Université de Waterloo. « Cette conclusion est importante parce que l’effet Unruh se situe à la limite entre ce que nous connaissons, c’est-à-dire la théorie quantique des champs et la relativité générale, et ce que nous ne comprenons pas encore, à savoir la gravitation quantique.

« Par conséquent, pour élaborer une théorie de ce qui se passe au-delà de ce que nous connaissons dans les domaines de la théorie quantique des champs et de la relativité, il faut garantir que les conditions que nous définissons en régime de basse énergie sont satisfaites. » [traduction]

Les chercheurs ont analysé la structure mathématique des corrélations d’un champ quantique dans des cadres allant au-delà de la théorie quantique des champs standard. Cette analyse a ensuite servi à définir les 3 conditions nécessaires et suffisantes pour préserver l’effet Unruh. Ces conditions permettent de déterminer les prédictions de théories de la gravitation quantique en régime de basse énergie, et les conclusions de cette recherche fournissent les outils nécessaires pour faire ces prédictions dans un large éventail de situations.

Étant donné qu’ils ont pu déterminer comment l’effet Unruh est modifié par des altérations de la structure d’une théorie quantique des champs, et l’importance relative de ces modifications, les chercheurs croient que cette étude fournit un solide cadre théorique permettant d’aborder et peut-être de tester cet aspect particulier en tant que l’une des manifestations phénoménologiques possibles de la gravitation quantique. Cela est particulièrement important et approprié même si l’effet Unruh n’a pas encore été mesuré de manière expérimentale, car on s’attend à ce que cette vérification survienne dans un avenir pas trop lointain.

« Des observateurs en mouvement accéléré et dans un référentiel inertiel ne s’entendent pas sur ce qu’est un "espace vide" », affirme Raúl Carballo-Rubio, postdoctorant à SISSA. « Ce qu’un observateur muni d’un détecteur de particules dans un référentiel inertiel considère comme du vide n’est pas ce que voit un observateur en mouvement accéléré et muni d’un détecteur de particules dans ce même vide. Le détecteur en mouvement accéléré trouvera des particules en équilibre thermique, comme dans un gaz chaud.

« Selon la prédiction, la température enregistrée doit être proportionnelle à l’accélération. D’autre part, on peut raisonnablement s’attendre à ce que la microstructure de l’espace-temps ou, plus généralement, tout nouveau phénomène physique qui modifie la structure de la théorie quantique des champs sur de courtes distances, entraîne des écarts par rapport à cette loi. Même si tous s’entendront probablement pour dire que de tels écarts doivent être présents, il n’y a pas de consensus sur l’ampleur de ces écarts pour un cadre théorique donné. C’est précisément ce que nous voulions comprendre. » [traduction]

L’article intitulé The Unruh Effect Without Thermality (Effet Unruh sans thermalité), dont les auteurs sont Eduardo Martin-Martinez et son étudiant au doctorat Jose de Ramon Rivera, de la Faculté de mathématiques et de l’Institut d’informatique quantique de l’Université de Waterloo, Raúl Carballo-Rubio, de SISSA, et Luis Garay, professeur à l’Université Complutense de Madrid, a été récemment publié dans la revue Physical Review Letters.

Le présent article a d’abord été publié en anglais dans les nouvelles de la Faculté de mathématiques de l'Université de Waterloo.

In English.