Mária Kieferová parle d’algorithmes quantiques, de ses études de doctorat dans 2 universités et de ses liens avec l’industrie.
Le prix d’excellence de l’Institut d’informatique quantique est remis à une personne qui fait des études supérieures en informatique quantique à l’Université de Waterloo et qui s’est distinguée par son excellence en recherche. La dernière lauréate en date, Mária Kieferová, nous a parlé de sa thèse de doctorat, de son prix et de ce qui l’attend dans le monde quantique.
Q : Félicitations Mária pour lobtention de ce prix dexcellence. Pouvez-vous nous parler des recherches qui vous ont amenée jusque-là? Quavez-vous étudié?
R : Jai fait un baccalauréat en physique, puis une maîtrise en physique théorique, à lUniversité Comenius de Bratislava, en Slovaquie. Pendant mes études de maîtrise, jai fait des stages à lIQC avec Michele Mosca et Nathan Wiebe, ce qui a facilité ma venue à Waterloo pour faire un doctorat en physique.
Q : Quelle est limportance de vos recherches de doctorat?
R : Même si nous savons que les ordinateurs quantiques peuvent surclasser asymptotiquement les ordinateurs classiques dans un certain nombre de tâches, ils sont encore loin de pouvoir résoudre des problèmes concrets difficiles. Il est donc impératif de rendre les algorithmes quantiques aussi efficaces que possible. Je me suis concentrée sur la conception de nouvelles techniques algorithmiques pouvant servir dans une variété dapplications, par exemple en apprentissage automatique ou en chimie. Jaime pouvoir faire une différence en minstruisant sur de nouvelles applications de linformatique quantique.
Q : Quels défis avez-vous dû relever pendant vos études de doctorat?
R : À mi-chemin dans mes études de doctorat, je me suis inscrite à une codirection de thèse et à un programme conjoint de l’Université de Waterloo et de l’Université Macquarie. Cela m’a permis de passer la moitié du temps en Australie et de travailler au sein de l’équipe de Dominic Berry. Par contre, l’entente entre les 2 universités s’est avérée très compliquée à conclure, et il a fallu 6 mois de plus que prévu à l’origine. Une autre difficulté a surgi lorsque je suis revenue au Canada pour soutenir ma thèse et que j’ai dû synchroniser l’obtention de mon diplôme dans les 2 universités. Heureusement, mes directeurs de thèse et le personnel administratif m’ont beaucoup aidée, et j’ai pu obtenir mon diplôme à temps. Je crois que la codirection de thèse constitue une magnifique occasion de faire de la recherche dans 2 milieux très différents, mais je souhaiterais que ce ne soit pas aussi difficile sur le plan administratif.
Q : Qu’est-ce qui vous a amenée à vous intéresser à la physique quantique?
R : Quand j’étais au secondaire, j’ai eu la chance de rencontrer beaucoup de physiciens et d’étudiants en physique, grâce au Tournoi des jeunes physiciens et à une compétition slovaque intitulée Séminaire de correspondance en physique. Ces activités m’ont appris que la physique n’est pas une question de formules à mémoriser et de nombres à manipuler.
Elles m’ont aussi donné l’occasion d’apprendre un peu de physique quantique et d’informatique quantique. Je me rappelle avoir été très déroutée par l’inégalité CHSH (inégalité de Clauser-Horne-Shimony-Holt). À cette époque, un ami plus âgé m’a conseillé de ne travailler sous aucun prétexte en informatique quantique, ce qui a évidemment piqué ma curiosité à propos de ce domaine.
Q : Comment avez-vous commencé à étudier en informatique quantique?
R : Dans le cadre de mon baccalauréat, j’ai choisi de faire un projet sur les marches quantiques, parce que cela combinait mes intérêts pour la physique quantique et l’informatique théorique, et je n’ai plus jamais quitté le domaine de l’informatique quantique. J’ai été chanceuse parce qu’il y a un excellent groupe d’informatique quantique à Bratislava. J’y ai passé plus de 3 ans et j’ai beaucoup appris de mon ancien directeur de recherche Daniel Nagaj. J’aime les défis que pose la recherche en informatique quantique et j’apprécie la communauté scientifique qui travaille dans ce domaine.
Q : Que signifie pour vous le fait d’avoir reçu le prix d’excellence de l’IQC?
R : Je suis très heureuse d’avoir étudié à l’IQC. Étant une femme et originaire d’un petit pays, je n’ai jamais eu le sentiment d’appartenir à la communauté scientifique. Être ainsi récompensée pour mes recherches signifie que, tout compte fait, je me débrouille assez bien.
Q: Qu’est-ce qui vous attend maintenant?
R : J’ai commencé un postdoctorat à l’Université technologique de Sydney, en Australie, sous la direction de Michael Bremner. Je continue de travailler sur les algorithmes quantiques, mais j’étudie aussi la théorie de la complexité et la possibilité de relier un jour des ordinateurs quantiques dans un réseau Internet quantique.
J’aimerais rester dans le milieu universitaire, et Sydney est un endroit passionnant. Mais en même temps, j’aimerais être en contact avec les progrès et les défis de l’industrie. C’est pour cela que j’ai commencé à travailler à temps partiel avec des amis de Zapata Computing sur la mise au point de logiciels pour les ordinateurs quantiques qui verront le jour à court terme.